[article] Où va l’Ukraine ? [texte imprimé] . - 2006 . - pp. 2-61. Langues : Français ( fre) in La Revue Nouvelle > 10 (octobre 2006) . - pp. 2-61
Catégories : |
32(4) Politique Union Européenne 32(47) Politique de la Russie 32(477) Politique de l'Ukraine 327 Relations internationales 33(477) Economie politique et sociale de l'Ukraine Famine en Ukraine "Holodomor" (1932-1933, URSS)
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Résumé : |
Sommaire :
Intro — Donat Carlier, Bernard De Backer, Aude Merlin
Voyage au pays des deux rives — Bernard De Backer
L’Ukraine, « carrefour des empires disparus », est une plaine immense divisée en deux par le fleuve Dniepr, s’étirant d’est en ouest sur près de quinze cents kilomètres. Des millions de ruraux, souvent âgés, y pratiquent une agriculture de subsistance sur des lopins cultivés à la seule force humaine ou animale. Quinze ans après la chute du communisme, les champs kolkhoziens paraissent en déshérence, la jeunesse partie vers les villes. À l’Ouest, ce sont souvent des citées anciennes qui ravalent leurs façades polonaises ou austro-hongroises. À l’Est, les centres urbains offrent de grands ensembles constructivistes et staliniens, les industries parsèment le paysage du Donbass où flotte une odeur de houille et d’acier. Au Centre-Nord, Kiev étend sa puissance retrouvée sur les deux rives du Dniepr. Si le développement de la « ville aux têtes dorées » est impressionnant, un mouvement similaire semble gagner le pays à petits pas. Atteindra-t-il les campagnes avant que la dernière babouchka ne repose dans un cimetière fleuri de lupins, à l’ombre des églises en bois et des pylônes où se posent les cigognes??
Réformes?: blocages, continuités et ruptures — Boris Najman
En dépit de l’indépendance, les réformes sociales et économiques ont été difficiles à mettre en oeuvre en raison des pesanteurs héritées du système soviétique, de l’importance du secteur informel, des lobbys et de l’absence d’un État de droit et d’un pouvoir judiciaire indépendant. Si les blocages sont internes, l’Union européenne porte également une part de responsabilité en ne fixant pas de date d’échéance pour l’intégration dans l’Union et en n’investissant pas dans les institutions d’un État de droit.
Amertume de la société civile, consolidation de la démocratie — Arnaud Dubien
La politique ukrainienne nous est devenue curieusement proche depuis la Révolution orange. Elle est évidemment plus complexe que ce que peuvent en dire quelques flashs aux infos. À travers les méandres de la vie politique ukrainienne, on voit poindre les signes d’une consolidation démocratique en Ukraine?; mais également le risque d’un découragement de la société civile, voire le ressentiment de certains de ses segments envers la coalition orange. La pression de la population a pourtant été décisive pour amorcer le mouvement de réforme politique, tant il est vrai qu’au-delà de sa diversité et de ses divisions, la société est, à maints égards, en avance sur ses représentants politiques.
Entre Russie et Union européenne — Rafael Calduch Cervera
Depuis son indépendance, l’Ukraine a fait l’expérience de la situation de charnière géostratégique continentale dans laquelle l’a placée la dissolution de l’Union soviétique. Au terme de quinze ans d’histoire qui ont vu s’entremêler l’attraction occidentale (de l’Union européenne et de l’Otan) et l’influence russe, un fragile équilibre propice à la situation intérieure du pays semble s’installer avec la cohabitation au pouvoir d’un président issu de la Révolution orange et d’un Premier ministre « prorusse ».
Quelles perspectives européennes pour l’Ukraine?? — Anne de Tinguy
Le jeu régional à travers lequel il faut comprendre les relations entre l’Union européenne et l’Ukraine est complexe. Si longtemps les réformes nécessaires à un rapprochement avec l’Union sont restées purement déclaratives, toute une série de tendances de fond poussent à ce rapprochement au-delà des positionnements politiques circonstanciels. Mais aujourd’hui, ce sont les États européens eux-mêmes, qui, en se gardant bien d’ouvrir une perspective d’adhésion, même à long terme, privent l’Ukraine d’un puissant ressort dans la transformation de son système politique et économique. C’est que l’Union européenne n’a ni digéré l’élargissement et l’échec de la Constitution ni opéré de choix clair face à une Russie qui cherche à maintenir l’Ukraine dans sa sphère d’influence. Le chantage gazier russe que les pays européens se sont empressés de relayer est à cet égard éclairant. Mais paradoxalement, il pourrait contribuer à détacher un peu plus Kiev de Moscou.
Un verre à moitié vide ou à moitié plein?? — Mykola Riabtchouk
Le bilan des gouvernements oranges de février 2005 à septembre 2006 est mitigé tant dans le domaine économique que politique. Cependant, les acquis sont irréversibles et les tendances démocratiques l’ont emporté. Le retour au pouvoir de Ianoukovitch ralentira certes les réformes indispensables pour envisager l’entrée dans l’Union européenne. Jusqu’ici, l’Union n’a pas manifesté beaucoup d’empressement à ne fût-ce que reconnaitre à l’Ukraine une identité propre, distincte de l’identité russe.
Holodomor 1933 : « le cimetière de la rude école » — Donat Carlier
Chaque année, en novembre, l’Ukraine commémore officiellement la famine de 1932-1933 qu’ils appellent Holodomor?; ce terme provient d’une contraction de « moriti holodom » qui signifie, en ukrainien, « infliger la mort par la faim ». On ne le traduit qu’imparfaitement par l’expression de « Grande famine » habituellement utilisée pour désigner la mort d’environ six millions de personnes en URSS, volontairement affamées par le pouvoir soviétique. Ce crime de masse est pourtant longtemps resté méconnu, quand il n’était pas simplement nié. Si aujourd’hui, les recherches historiques ont pu faire progresser significativement notre connaissance de ces évènements, leur interprétation reste toutefois sujette à débat. Celui-ci tourne essentiellement autour du poids respectif des deux dimensions principales prises par cette tragédie en Ukraine?: la destruction de la culture traditionnelle paysanne par la collectivisation et la répression du sentiment national. |
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[article] inLa Revue Nouvelle > 10 (octobre 2006) . - pp. 2-61
Titre : |
Où va l’Ukraine ? |
Type de document : |
texte imprimé |
Année de publication : |
2006 |
Article en page(s) : |
pp. 2-61 |
Langues : |
Français (fre) |
Catégories : |
32(4) Politique Union Européenne 32(47) Politique de la Russie 32(477) Politique de l'Ukraine 327 Relations internationales 33(477) Economie politique et sociale de l'Ukraine Famine en Ukraine "Holodomor" (1932-1933, URSS)
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Résumé : |
Sommaire :
Intro — Donat Carlier, Bernard De Backer, Aude Merlin
Voyage au pays des deux rives — Bernard De Backer
L’Ukraine, « carrefour des empires disparus », est une plaine immense divisée en deux par le fleuve Dniepr, s’étirant d’est en ouest sur près de quinze cents kilomètres. Des millions de ruraux, souvent âgés, y pratiquent une agriculture de subsistance sur des lopins cultivés à la seule force humaine ou animale. Quinze ans après la chute du communisme, les champs kolkhoziens paraissent en déshérence, la jeunesse partie vers les villes. À l’Ouest, ce sont souvent des citées anciennes qui ravalent leurs façades polonaises ou austro-hongroises. À l’Est, les centres urbains offrent de grands ensembles constructivistes et staliniens, les industries parsèment le paysage du Donbass où flotte une odeur de houille et d’acier. Au Centre-Nord, Kiev étend sa puissance retrouvée sur les deux rives du Dniepr. Si le développement de la « ville aux têtes dorées » est impressionnant, un mouvement similaire semble gagner le pays à petits pas. Atteindra-t-il les campagnes avant que la dernière babouchka ne repose dans un cimetière fleuri de lupins, à l’ombre des églises en bois et des pylônes où se posent les cigognes??
Réformes?: blocages, continuités et ruptures — Boris Najman
En dépit de l’indépendance, les réformes sociales et économiques ont été difficiles à mettre en oeuvre en raison des pesanteurs héritées du système soviétique, de l’importance du secteur informel, des lobbys et de l’absence d’un État de droit et d’un pouvoir judiciaire indépendant. Si les blocages sont internes, l’Union européenne porte également une part de responsabilité en ne fixant pas de date d’échéance pour l’intégration dans l’Union et en n’investissant pas dans les institutions d’un État de droit.
Amertume de la société civile, consolidation de la démocratie — Arnaud Dubien
La politique ukrainienne nous est devenue curieusement proche depuis la Révolution orange. Elle est évidemment plus complexe que ce que peuvent en dire quelques flashs aux infos. À travers les méandres de la vie politique ukrainienne, on voit poindre les signes d’une consolidation démocratique en Ukraine?; mais également le risque d’un découragement de la société civile, voire le ressentiment de certains de ses segments envers la coalition orange. La pression de la population a pourtant été décisive pour amorcer le mouvement de réforme politique, tant il est vrai qu’au-delà de sa diversité et de ses divisions, la société est, à maints égards, en avance sur ses représentants politiques.
Entre Russie et Union européenne — Rafael Calduch Cervera
Depuis son indépendance, l’Ukraine a fait l’expérience de la situation de charnière géostratégique continentale dans laquelle l’a placée la dissolution de l’Union soviétique. Au terme de quinze ans d’histoire qui ont vu s’entremêler l’attraction occidentale (de l’Union européenne et de l’Otan) et l’influence russe, un fragile équilibre propice à la situation intérieure du pays semble s’installer avec la cohabitation au pouvoir d’un président issu de la Révolution orange et d’un Premier ministre « prorusse ».
Quelles perspectives européennes pour l’Ukraine?? — Anne de Tinguy
Le jeu régional à travers lequel il faut comprendre les relations entre l’Union européenne et l’Ukraine est complexe. Si longtemps les réformes nécessaires à un rapprochement avec l’Union sont restées purement déclaratives, toute une série de tendances de fond poussent à ce rapprochement au-delà des positionnements politiques circonstanciels. Mais aujourd’hui, ce sont les États européens eux-mêmes, qui, en se gardant bien d’ouvrir une perspective d’adhésion, même à long terme, privent l’Ukraine d’un puissant ressort dans la transformation de son système politique et économique. C’est que l’Union européenne n’a ni digéré l’élargissement et l’échec de la Constitution ni opéré de choix clair face à une Russie qui cherche à maintenir l’Ukraine dans sa sphère d’influence. Le chantage gazier russe que les pays européens se sont empressés de relayer est à cet égard éclairant. Mais paradoxalement, il pourrait contribuer à détacher un peu plus Kiev de Moscou.
Un verre à moitié vide ou à moitié plein?? — Mykola Riabtchouk
Le bilan des gouvernements oranges de février 2005 à septembre 2006 est mitigé tant dans le domaine économique que politique. Cependant, les acquis sont irréversibles et les tendances démocratiques l’ont emporté. Le retour au pouvoir de Ianoukovitch ralentira certes les réformes indispensables pour envisager l’entrée dans l’Union européenne. Jusqu’ici, l’Union n’a pas manifesté beaucoup d’empressement à ne fût-ce que reconnaitre à l’Ukraine une identité propre, distincte de l’identité russe.
Holodomor 1933 : « le cimetière de la rude école » — Donat Carlier
Chaque année, en novembre, l’Ukraine commémore officiellement la famine de 1932-1933 qu’ils appellent Holodomor?; ce terme provient d’une contraction de « moriti holodom » qui signifie, en ukrainien, « infliger la mort par la faim ». On ne le traduit qu’imparfaitement par l’expression de « Grande famine » habituellement utilisée pour désigner la mort d’environ six millions de personnes en URSS, volontairement affamées par le pouvoir soviétique. Ce crime de masse est pourtant longtemps resté méconnu, quand il n’était pas simplement nié. Si aujourd’hui, les recherches historiques ont pu faire progresser significativement notre connaissance de ces évènements, leur interprétation reste toutefois sujette à débat. Celui-ci tourne essentiellement autour du poids respectif des deux dimensions principales prises par cette tragédie en Ukraine?: la destruction de la culture traditionnelle paysanne par la collectivisation et la répression du sentiment national. |
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