[article] Qu’est-ce que croire ? [texte imprimé] / Jacques Vialle, Directeur de publication . - 2000 . - 210 p. Langues : Français ( fre) in Agone > 23 (2000) . - 210 p.
Catégories : |
2 Religions Intégrisme religieux 39 Anthropologie culturelle / Civilisation 398.3 Croyances Usages populaires Superstitions Paranormal 572 Anthropologie Ethnologie
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Résumé : |
Présentation :
« Brûler en effigie. Embrasser l’image du bien-aimé. Cela ne repose naturellement pas sur la croyance qu’on produit un certain effet sur l’objet que l’image représente. Cela vise à procurer une satisfaction et y parvient effectivement. Ou plutôt, cela ne vise rien ; nous agissons ainsi et nous avons alors un sentiment de satisfaction. On pourrait embrasser aussi le nom de la bien-aimée, et alors apparaîtrait clairement comment le nom remplace celle-ci. Le même sauvage qui, apparemment pour tuer son ennemi, transperce l’image de celui-ci, construit sa hutte en bois de façon bien réelle et taille sa flèche selon les règles de l’art, et non en effigie. » Ludwig Wittgenstein
Sommaire :
Éditorial. À l’ombre des mentalités primitives, Jacques Vialle
Remarques sur Le Rameau d’Or de Frazer, Ludwig Wittgenstein
La manière dont Frazer expose les conceptions magiques et religieuses des hommes n’est pas satisfaisante : elle fait apparaître ces conceptions comme des erreurs. Ainsi donc saint Augustin était dans l’erreur lorsqu’il invoque Dieu à chaque page des Confessions ? Mais – peut-on dire – s’il n’était pas dans l’erreur, le saint bouddhiste ou n’importe quel autre l’était tout de même, lui dont la religion exprime de tout autres conceptions. Mais aucun d’entre eux n’était dans l’erreur, excepté là où il mettait en place une théorie.
Wittgenstein critique de Frazer, Jacques Bouveresse
L’erreur fondamentale qu’a commise Frazer est de la même nature que celle que nous commettons la plupart du temps en philosophie. Nous nous méprenons sur la nature exacte du problème qu’il s’agit de résoudre et nous croyons à tort qu’il doit être résolu par l’invention d’une explication ou d’une théorie, avec un risque de désillusion comme celui de découvrir que les théories et les explications philosophiques ne résolvent finalement pas du tout les perplexités philosophiques. Wittgenstein soutient qu’il ne devrait en principe rien y avoir d’hypothétique dans les considérations du philosophe ; et la raison en est que, là encore, une hypothèse ne peut procurer à l’esprit le genre d’apaisement qu’il recherche.
L’interprétation & l’interprète. À propos des choses de la religion, Paul Veyne
Le stoïcisme ou la croyance en un Paradis soulagent-ils un condamné à mort ? Un peu, sans doute. Une amulette rassure-t-elle vraiment son porteur ? Un peu. Langage médiocre et obscur, assurément : « un peu » n’est pas un vocable à dignité scientifique ou philosophique. Et pourtant l’expérience et l’action de chacun ne sont faites que d’innombrables « un peu ».
Comment se fixe la croyance, Charles Sanders Peirce
Certainement, l’homme est, somme toute, un être logique ; mais il ne l’est pas complètement. Par exemple, nous sommes pour la plupart portés à la confiance et à l’espoir, plus que la logique ne nous y autoriserait. Nous semblons faits de telle sorte que, en l’absence de tout fait sur lequel nous appuyer, nous sommes heureux et satisfaits de nous-mêmes ; en sorte que l’expérience a pour effet de contredire sans cesse nos espérances et nos aspirations. Cependant l’application de ce correctif durant toute une vie ne déracine pas ordinairement cette disposition à la confiance. Quand l’espoir n’est entamé par aucune expérience, il est vraisemblable que cet optimisme est extravagant.
Les prisons de l’esprit, Henri Broch
La science et la culture sont au centre de l’homme moderne. Voilà pourquoi, au-delà des difficultés qui peuvent exister, un scientifique, citoyen impliqué dans la société dans laquelle il vit, peut et doit soulever les problèmes posés par le développement des pseudosciences et des croyances. Il est d’autant plus important que cela se fasse que la science est, par définition, ce qui gêne les dogmatiques. Le rôle de citoyen du scientifique prend donc un sens particulier et s’élargit au-delà de la simple sphère du « paranormal » et son action dans la respublica, par essence même politique, peut aider à mettre en évidence que croyances et paranormal sont intrinsèquement opposés à l’homme.
Science & religion : l’irréductible antagonisme, Jean Bricmont
Il semble que l’heure soit au dialogue, après des siècles de conflit et de séparation, entre science et foi, ou science et théologie. Le « positivisme » n’est plus de mise en philosophie, la science, post-quantique et post-gödelienne, s’est faite modeste ; les théologiens se sont mis à l’écoute de la science, qu’ils ont renoncée à contredire ou à régenter. Tout ne va-t-il pas pour le mieux dans le meilleur des mondes ? Non. Je vais plaider une thèse qui va à l’encontre de cette tendance et montrer que, si elles sont bien comprises, la démarche scientifique et la démarche religieuse sont en fait inconciliables.
FICTIONS & DICTIONS
Écartez le soleil un moment, car je veux dormir, Eyvind Johnson
(Traduit du suédois par Philippe Bouquet-Jadis)
Maintenant il n’y avait plus de tels visages devant lui. Les cinq ou six délégués masculins étaient durs, peut-être même fanatiques. C’étaient des visages d’armées secrètes, des épaules qui pouvaient porter des armes lourdes et des mains qui se crispaient avec force et obstination sur des affirmations simples et irréfutables telles que : nous devons nous battre par tous les moyens car autrement nous serons écrasés – ou bien des mains énergiques qui serraient des serviettes contenant des preuves convaincantes que la résistance armée ne pouvait jamais conduire à autre chose qu’à plus de misère, plus d’esclavage et plus de mort.
Chanson du tir de barrage, Jean Bernier
L’artillerie ennemie cependant prenait des forces. Régiment en réserve, triste et las vagabond qui dirige une marche incertaine vers les lieux où le haut commandement pense, sans être certain, avoir besoin de toi, passe sous le tir de barrage et tâche à conserver ton esprit offensif ! Aime la terre fantassin, aime-la ! C’est ta forte cuirasse et c’est ton seul espoir. Le défi du soldat à l’air libre ! L’obscénité du macchabée non enterré ! Mort ou vif, tu dois être dedans. Sous le tir de barrage, renifle son odeur qui te rassure. Bénis le fantassin précédent qui a creusé le trou sauveur et si, par aventure, tu t’arrêtes sur la plaine, tire de ton ceinturon ta pelle-bêche précieuse et creuse.
MARGINALIA
Une vision très sélective de l’histoire. Mise à l’épreuve de la “nouvelle doctrine”, Noam Chomsky (Traduit de l’anglais par Frédéric Cotton)
Témoignage sur l’insurrection viennoise de 1934, Julius Dickmann. Introduit par Bouris Souvarine. Avant-propos de Charles Jacquier
Julien Benda & la justice abstraite, Jean Malaquais Avant-propos de Charles Jacquier
A scholarship with committment. Pour un savoir engagé, Pierre Bourdieu |
Permalink : |
https://bibliotheque.territoires-memoire.be/pmb/opac_css/index.php?lvl=notice_di |
[article]
Titre : |
Qu’est-ce que croire ? |
Type de document : |
texte imprimé |
Auteurs : |
Jacques Vialle, Directeur de publication |
Année de publication : |
2000 |
Article en page(s) : |
210 p. |
Langues : |
Français (fre) |
Catégories : |
2 Religions Intégrisme religieux 39 Anthropologie culturelle / Civilisation 398.3 Croyances Usages populaires Superstitions Paranormal 572 Anthropologie Ethnologie
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Résumé : |
Présentation :
« Brûler en effigie. Embrasser l’image du bien-aimé. Cela ne repose naturellement pas sur la croyance qu’on produit un certain effet sur l’objet que l’image représente. Cela vise à procurer une satisfaction et y parvient effectivement. Ou plutôt, cela ne vise rien ; nous agissons ainsi et nous avons alors un sentiment de satisfaction. On pourrait embrasser aussi le nom de la bien-aimée, et alors apparaîtrait clairement comment le nom remplace celle-ci. Le même sauvage qui, apparemment pour tuer son ennemi, transperce l’image de celui-ci, construit sa hutte en bois de façon bien réelle et taille sa flèche selon les règles de l’art, et non en effigie. » Ludwig Wittgenstein
Sommaire :
Éditorial. À l’ombre des mentalités primitives, Jacques Vialle
Remarques sur Le Rameau d’Or de Frazer, Ludwig Wittgenstein
La manière dont Frazer expose les conceptions magiques et religieuses des hommes n’est pas satisfaisante : elle fait apparaître ces conceptions comme des erreurs. Ainsi donc saint Augustin était dans l’erreur lorsqu’il invoque Dieu à chaque page des Confessions ? Mais – peut-on dire – s’il n’était pas dans l’erreur, le saint bouddhiste ou n’importe quel autre l’était tout de même, lui dont la religion exprime de tout autres conceptions. Mais aucun d’entre eux n’était dans l’erreur, excepté là où il mettait en place une théorie.
Wittgenstein critique de Frazer, Jacques Bouveresse
L’erreur fondamentale qu’a commise Frazer est de la même nature que celle que nous commettons la plupart du temps en philosophie. Nous nous méprenons sur la nature exacte du problème qu’il s’agit de résoudre et nous croyons à tort qu’il doit être résolu par l’invention d’une explication ou d’une théorie, avec un risque de désillusion comme celui de découvrir que les théories et les explications philosophiques ne résolvent finalement pas du tout les perplexités philosophiques. Wittgenstein soutient qu’il ne devrait en principe rien y avoir d’hypothétique dans les considérations du philosophe ; et la raison en est que, là encore, une hypothèse ne peut procurer à l’esprit le genre d’apaisement qu’il recherche.
L’interprétation & l’interprète. À propos des choses de la religion, Paul Veyne
Le stoïcisme ou la croyance en un Paradis soulagent-ils un condamné à mort ? Un peu, sans doute. Une amulette rassure-t-elle vraiment son porteur ? Un peu. Langage médiocre et obscur, assurément : « un peu » n’est pas un vocable à dignité scientifique ou philosophique. Et pourtant l’expérience et l’action de chacun ne sont faites que d’innombrables « un peu ».
Comment se fixe la croyance, Charles Sanders Peirce
Certainement, l’homme est, somme toute, un être logique ; mais il ne l’est pas complètement. Par exemple, nous sommes pour la plupart portés à la confiance et à l’espoir, plus que la logique ne nous y autoriserait. Nous semblons faits de telle sorte que, en l’absence de tout fait sur lequel nous appuyer, nous sommes heureux et satisfaits de nous-mêmes ; en sorte que l’expérience a pour effet de contredire sans cesse nos espérances et nos aspirations. Cependant l’application de ce correctif durant toute une vie ne déracine pas ordinairement cette disposition à la confiance. Quand l’espoir n’est entamé par aucune expérience, il est vraisemblable que cet optimisme est extravagant.
Les prisons de l’esprit, Henri Broch
La science et la culture sont au centre de l’homme moderne. Voilà pourquoi, au-delà des difficultés qui peuvent exister, un scientifique, citoyen impliqué dans la société dans laquelle il vit, peut et doit soulever les problèmes posés par le développement des pseudosciences et des croyances. Il est d’autant plus important que cela se fasse que la science est, par définition, ce qui gêne les dogmatiques. Le rôle de citoyen du scientifique prend donc un sens particulier et s’élargit au-delà de la simple sphère du « paranormal » et son action dans la respublica, par essence même politique, peut aider à mettre en évidence que croyances et paranormal sont intrinsèquement opposés à l’homme.
Science & religion : l’irréductible antagonisme, Jean Bricmont
Il semble que l’heure soit au dialogue, après des siècles de conflit et de séparation, entre science et foi, ou science et théologie. Le « positivisme » n’est plus de mise en philosophie, la science, post-quantique et post-gödelienne, s’est faite modeste ; les théologiens se sont mis à l’écoute de la science, qu’ils ont renoncée à contredire ou à régenter. Tout ne va-t-il pas pour le mieux dans le meilleur des mondes ? Non. Je vais plaider une thèse qui va à l’encontre de cette tendance et montrer que, si elles sont bien comprises, la démarche scientifique et la démarche religieuse sont en fait inconciliables.
FICTIONS & DICTIONS
Écartez le soleil un moment, car je veux dormir, Eyvind Johnson
(Traduit du suédois par Philippe Bouquet-Jadis)
Maintenant il n’y avait plus de tels visages devant lui. Les cinq ou six délégués masculins étaient durs, peut-être même fanatiques. C’étaient des visages d’armées secrètes, des épaules qui pouvaient porter des armes lourdes et des mains qui se crispaient avec force et obstination sur des affirmations simples et irréfutables telles que : nous devons nous battre par tous les moyens car autrement nous serons écrasés – ou bien des mains énergiques qui serraient des serviettes contenant des preuves convaincantes que la résistance armée ne pouvait jamais conduire à autre chose qu’à plus de misère, plus d’esclavage et plus de mort.
Chanson du tir de barrage, Jean Bernier
L’artillerie ennemie cependant prenait des forces. Régiment en réserve, triste et las vagabond qui dirige une marche incertaine vers les lieux où le haut commandement pense, sans être certain, avoir besoin de toi, passe sous le tir de barrage et tâche à conserver ton esprit offensif ! Aime la terre fantassin, aime-la ! C’est ta forte cuirasse et c’est ton seul espoir. Le défi du soldat à l’air libre ! L’obscénité du macchabée non enterré ! Mort ou vif, tu dois être dedans. Sous le tir de barrage, renifle son odeur qui te rassure. Bénis le fantassin précédent qui a creusé le trou sauveur et si, par aventure, tu t’arrêtes sur la plaine, tire de ton ceinturon ta pelle-bêche précieuse et creuse.
MARGINALIA
Une vision très sélective de l’histoire. Mise à l’épreuve de la “nouvelle doctrine”, Noam Chomsky (Traduit de l’anglais par Frédéric Cotton)
Témoignage sur l’insurrection viennoise de 1934, Julius Dickmann. Introduit par Bouris Souvarine. Avant-propos de Charles Jacquier
Julien Benda & la justice abstraite, Jean Malaquais Avant-propos de Charles Jacquier
A scholarship with committment. Pour un savoir engagé, Pierre Bourdieu |
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in Agone > 23 (2000) . - 210 p.
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