Le savoir-déporté : camps, histoire, psychanalyse ; Précédé de Une vie à l'oeuvre [texte imprimé] / Anne-Lise Stern (1922-....), Auteur ; Nadine Fresco, Préfacier, etc. ; Martine Leibovici, Préfacier, etc. . - Paris : Éditions du Seuil, 2004 . - 335 p. ; 23 cm. - ( La librairie du XXe siècle) . ISBN : 2-02-066252-3 : 22 EUR Langues : Français ( fre)
Catégories : |
159.9 Psychologie 159.964 Psychanalyse 929 Biographies et témoignages 929 Stern, Anne-Lise 94(100)"1933/45" Auschwitz (Pologne) 94(100)"1933/45" Univers concentrationnaire nazi. Camps de concentration et d'extermination. Déportation Judéocide / Shoah
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Index. décimale : |
1 Philosophie / Psychologie |
Résumé : |
4e de couverture :
Naître, c’est naître après. « Pour tout un chacun des générations post-nazies, la petite et la grande histoire se sont nouées dans la poubelle des camps. »
La femme qui parle ainsi a été déportée à vingt-deux ans à Auschwitz-Birkenau. Ce « nouage entre le privé et le public » a d’abord été pour elle une réalité. Plus tard, devenue psychanalyste, elle a confronté son expérience du camp à sa pratique clinique, les « wagons de bestiaux » au divan, et élaboré à partir de là une notion qui donne son titre au livre : le savoir-déporté.
L'auteur :
Anne-Lise Stern, née en 1922, a été déportée en 1944 à Auschwitz-Birkenau. Elle est aujourd’hui psychanalyste à Paris. Membre de l’Ecole freudienne de Paris (1964-1980), elle a écrit de nombreux articles et anime depuis 1979 un séminaire sur le thème « Camp, histoire, psychanalyse. Leur nouage dans l’actualité européenne ». « Vous ne saurez jamais », disent les déportés ; elle pense : « mieux vaut tard que jamais, mieux vaut jamais que taire ».
Extrait :
En juin 1945, je suis rentrée à la maison dans le sud de la France. Mes deux parents étaient là . Mon père est reparti aussitôt à son travail comme médecin dans l’armée française, d’occupation, en Forêt-Noire, dans un hôpital pour soldats malades des nerfs, traumatisés de guerre. Et moi, je me suis mise au mien, de travail: travail d’écriture. Essayer d’écrire, comme la plupart des revenants, ce que nous avions vécu, ce qu’on nous avait fait vivre, ce voyage. En allemand on dit : Erfahrung, expérience, et Fahren, voyager.
Un chapitre s’intitulait «Le wagon à bestiaux», celui qui, vers la fin de la guerre, nous avait amenées, dans un interminable trajet de huit jours, de Raguhn, petit camp de travail près de Dessau, pas loin du Bauhaus, jusqu’à Theresienstadt. C’était la fin de la guerre. Nous étions les premières à faire ce trajet en sens inverse et non pas de Theresienstadt à Auschwitz. Donc les premières témoins oculaires à leur rendre compte là -bas de ce qu’étaient devenus les leurs, ceux du «camp des familles» qui, comme les tsiganes, avaient été à Birkenau d’abord en famille, et puis gazés en une nuit. Notre dégaine, pour leurs yeux, faisait aussi témoignage.
Pendant que j’écrivais, ma mère avait pris un cahier, d’écolier, et page après page traduisait en allemand.
Nos deux Posten (gardes) étaient des Waffen SS un peu vieux et avaient déjà caché des vêtements civils dans des cartons de margarine. Ils discutaient comment nous ranger au mieux, ils voulaient le centre du wagon pour eux. «’Reculez, sales bêtes. Vous êtes des bêtes, pas des femmes.’ -- ’Votre faute’, dit quelqu’un ’ moi peut-être. -- ’Nous aussi avons faim et des poux, mais nous ne nous comportons pas comme vous. Vous pourriez nous ménager un peu. Votre Posten est-il un mauvais Posten ? »
Le cahier de ma mère s’arrête là . Elle a renoncé avant d’arriver à la phrase suivante : «Der Posten muss auch schlafen» -- le garde lui aussi doit dormir. «Der Posten ist auch ein Mensch» -- le garde lui aussi est un être humain. Nous y sommes, à la question de fond : le Posten est un être humain. |
Permalink : |
https://bibliotheque.territoires-memoire.be/pmb/opac_css/index.php?lvl=notice_di |
Titre : |
Le savoir-déporté : camps, histoire, psychanalyse |
Autre titre : |
Précédé de Une vie à l'oeuvre |
Type de document : |
texte imprimé |
Auteurs : |
Anne-Lise Stern (1922-....), Auteur ; Nadine Fresco, Préfacier, etc. ; Martine Leibovici, Préfacier, etc. |
Editeur : |
Paris : Éditions du Seuil |
Année de publication : |
2004 |
Collection : |
La librairie du XXe siècle |
Importance : |
335 p. |
Format : |
23 cm |
ISBN/ISSN/EAN : |
2-02-066252-3 |
Prix : |
22 EUR |
Langues : |
Français (fre) |
Catégories : |
159.9 Psychologie 159.964 Psychanalyse 929 Biographies et témoignages 929 Stern, Anne-Lise 94(100)"1933/45" Auschwitz (Pologne) 94(100)"1933/45" Univers concentrationnaire nazi. Camps de concentration et d'extermination. Déportation Judéocide / Shoah
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Index. décimale : |
1 Philosophie / Psychologie |
Résumé : |
4e de couverture :
Naître, c’est naître après. « Pour tout un chacun des générations post-nazies, la petite et la grande histoire se sont nouées dans la poubelle des camps. »
La femme qui parle ainsi a été déportée à vingt-deux ans à Auschwitz-Birkenau. Ce « nouage entre le privé et le public » a d’abord été pour elle une réalité. Plus tard, devenue psychanalyste, elle a confronté son expérience du camp à sa pratique clinique, les « wagons de bestiaux » au divan, et élaboré à partir de là une notion qui donne son titre au livre : le savoir-déporté.
L'auteur :
Anne-Lise Stern, née en 1922, a été déportée en 1944 à Auschwitz-Birkenau. Elle est aujourd’hui psychanalyste à Paris. Membre de l’Ecole freudienne de Paris (1964-1980), elle a écrit de nombreux articles et anime depuis 1979 un séminaire sur le thème « Camp, histoire, psychanalyse. Leur nouage dans l’actualité européenne ». « Vous ne saurez jamais », disent les déportés ; elle pense : « mieux vaut tard que jamais, mieux vaut jamais que taire ».
Extrait :
En juin 1945, je suis rentrée à la maison dans le sud de la France. Mes deux parents étaient là . Mon père est reparti aussitôt à son travail comme médecin dans l’armée française, d’occupation, en Forêt-Noire, dans un hôpital pour soldats malades des nerfs, traumatisés de guerre. Et moi, je me suis mise au mien, de travail: travail d’écriture. Essayer d’écrire, comme la plupart des revenants, ce que nous avions vécu, ce qu’on nous avait fait vivre, ce voyage. En allemand on dit : Erfahrung, expérience, et Fahren, voyager.
Un chapitre s’intitulait «Le wagon à bestiaux», celui qui, vers la fin de la guerre, nous avait amenées, dans un interminable trajet de huit jours, de Raguhn, petit camp de travail près de Dessau, pas loin du Bauhaus, jusqu’à Theresienstadt. C’était la fin de la guerre. Nous étions les premières à faire ce trajet en sens inverse et non pas de Theresienstadt à Auschwitz. Donc les premières témoins oculaires à leur rendre compte là -bas de ce qu’étaient devenus les leurs, ceux du «camp des familles» qui, comme les tsiganes, avaient été à Birkenau d’abord en famille, et puis gazés en une nuit. Notre dégaine, pour leurs yeux, faisait aussi témoignage.
Pendant que j’écrivais, ma mère avait pris un cahier, d’écolier, et page après page traduisait en allemand.
Nos deux Posten (gardes) étaient des Waffen SS un peu vieux et avaient déjà caché des vêtements civils dans des cartons de margarine. Ils discutaient comment nous ranger au mieux, ils voulaient le centre du wagon pour eux. «’Reculez, sales bêtes. Vous êtes des bêtes, pas des femmes.’ -- ’Votre faute’, dit quelqu’un ’ moi peut-être. -- ’Nous aussi avons faim et des poux, mais nous ne nous comportons pas comme vous. Vous pourriez nous ménager un peu. Votre Posten est-il un mauvais Posten ? »
Le cahier de ma mère s’arrête là . Elle a renoncé avant d’arriver à la phrase suivante : «Der Posten muss auch schlafen» -- le garde lui aussi doit dormir. «Der Posten ist auch ein Mensch» -- le garde lui aussi est un être humain. Nous y sommes, à la question de fond : le Posten est un être humain. |
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