[article] Territoires ? : dossier [texte imprimé] . - 2007 . - pp. 9-20. Langues : Français ( fre) in C4 > 155-156 (mai-juin 2007) . - pp. 9-20
Catégories : |
321.01 Pouvoirs.Frontières 71 Aménagement du territoire. Urbanisme. Architecture paysagère
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Résumé : |
DOSSIER : TERRITOIRES ?
"SANS FRONTIERES", LA FIN D'UN RÊVE?
Il y a 15 ans, on parlait de « fin de l’Histoire » et les diplomates n’avaient que le mot « multilatéral » à la bouche; les morceaux du rideau de fer tombaient les uns après les autres. En Europe l’espace Schengen entrait en vigueur en 1995 et augurait de belles perspectives de libre déplacement. Les «sans-frontières», sur la lancée de leurs aînés des années 70 et 80 (Médecins Sans Frontières, Reporters Sans Frontières…), florissaient sur fond de promesses de paix et de réduction des iniquités, l’appellation proliférant au point de contaminer tous les domaines de la société. Naissaient ainsi les associations « Meubles sans frontières », «Douleurs sans frontières » et même « Autistes sans frontières », tout un programme.
CARTOGRAPHIE DE L'INTIME
Que nous disent les configurations des espaces de vie des couples ? Comment ceux-ci appréhendent-ils le partage et l’appropriation d’une zone commune où il faut manger, cuisiner, dormir, lire, se détendre, travailler, faire sa toilette? Existe-t-il des règles et lesquelles ? L’aménagement est-il spontané ou, au contraire, construit et réfléchi ? Trois couples ont accepté de nous ouvrir les portes de leurs territoires. Etats des lieux.
CHASSEURS DE CHICANOS DU DIMANCHE : LES MINUTEMEN
Comment devenir un gros beauf en moins d’une minute ? Simple: suivre l’exemple des volontaires civils qui, depuis avril 2005, patrouillent avec leur camping-car le long de la frontière entre les Etats-Unis et le Mexique.
DANS LA RETINE DE L'ENFER - EXTRAITS
Nous, nous sommes assurés d’avoir fait disparaître nos traces en cours de chemin, sur les pierres couchées face à la lune, sur l’herbe des champs hostiles, dans les derniers rayons de lune qui nous ont éclairés, dans les dernières fines gouttes d’une pluie glacée, dans le souffle que nos poumons rejetaient essoufflés. Nous avons pris soin de marcher vers le vent comme vers nous-mêmes pour qu’il ne puisse dénoncer nos souffrances et nos peines. Nous avons évité que la lumière des dernières étoiles ne nous surprenne et dénude nos rêves.
DROIT DANS LES MURS!
De jour comme de nuit, le mur fait le monde et ses habitants font le mur. Exhibée comme une sinistre et révélatrice mise en garde à la face de l’univers infini, la seule construction humaine visible depuis l’espace durant les clairs de Terre est un mur : la muraille de Chine, un ouvrage millénaire et militaire de dizaines de milliers de kilomètres de (très, très) long.
ÊTRE D'ICI, NAÎTRE AILLEURS - RENCONTRES
«Je ne me sens étranger ni à Londres, ni à New-York, ni en Inde mais le fait que je suis né en Inde et que j’y suis resté très attaché est toujours là . C’est cette réalité qui sous-tend mon identité.(…) Aujourd’hui notre identité est faite de 50 éléments différents, ce qui fait qu’elle se recoupe bien plus qu’autrefois avec celle des autres. Un chauve hindou et un chauve musulman comme moi ont beaucoup en commun, surtout quand le soleil tape.» * Salman Rushdie
L'ESPACE PUBLIC, UN CLUB PRIVE?
L’espace public c’est la place en bas de chez vous. Si vous arrivez à vous l’approprier, à la vivre, elle peut devenir l’un de vos territoires, l’un des multiples lieux que vous avez investi d’un souvenir ou d’un vécu. Mais l’espace public, c’est aussi le lieu abstrait du débat, lieu d’expression des contre-pouvoirs, espace de transition entre les volontés citoyennes et l’autorité de l’Etat. Cette place, en bas de chez vous, est-elle réellement publique ? Tout le monde peut-il s’y asseoir nonchalamment? Tout le monde peut-il y manifester et y exprimer ses opinions ? L’espace qui s’étend sous vos yeux et vos porte-voix peut-il être approprié comme territoire par n’importe qui, ou est-il la chasse gardée de certains ?
L'EUROPE : FORTERESSE CONTRE DE NOUVELLES INVASIONS OU TERRITOIRE SANS NATION?
En marge d’une interview qu’il nous accordait pour le dossier précédent sur les transports, l’un des portes-paroles de l’UDEP (Union pour la défense des sans-papiers) nous signalait un fâcheux paradoxe: depuis l’entrée en vigueur de la liberté de circulation dans l’espace Schengen, la mobilité des clandestins souffre toujours plus de répression. L’Union Européenne ne cesse d’ailleurs pas de perfectionner son arsenal répressif dans la guerre qu’elle leur a déclarée. Comme si la liberté et les droits des uns (les citoyens européens de première catégorie) étaient liés par un fil bien étrange à l’interdiction et au refoulement des autres (les candidats à l’exil et à l’asile).
LE TEMPS D'UNE PASSE
Le quartier nord est souvent évoqué comme symbole des tensions urbaines à Bruxelles. L’avancée prioritaire des bureaux sur les habitations y est rythmée par les navetteurs qui, à peine sortis de l’imposante gare du Nord, continuent de circuler comme sur des rails. La transformation lente de ce quartier promis à un avenir économique aux horizons européens évolue au sein d’une population locale en majorité d’origine étrangère. Ce «nettoyage» planifié du quartier se fait apparemment sans heurts. Il est presque approuvé par les bruxellois du fait de l’image qu’ils ont de cette zone : un quartier dangereux, berceau de pulsions meurtrières de populations qu’on ne peut imaginer qu’en déroute. Ce quartier renferme pourtant des espaces socialement indispensables.
LES TERRITOIRES COMME ACTIVITES : NE PAS PENSER A VIDE
Disons que je suis ethnographe et que, comme tel, je fais du « terrain », ce qui consiste à fabriquer un champ relationnel et finalement un point de vue, le plus intéressant possible. Territoire et terrain ont une racine commune et la construction d’un terrain relationnel correspond justement à la saisie de « territoires ». Disons que les activités territoriales sont les manières qu’ont les entités vivantes ou physiques d’entretenir les unes avec les autres des postures, des gestes, des esthétiques spécifiques mais également des énoncés. C’est bien tout un ensemble relationnel en acte qui forme un « ici » et déploie quelque chose de l’ordre d’une frontière. Comme ethnographe, je ne peux donc pas présupposer la forme et le chemin exacts de cette frontière avant d’étudier un territoire : je ne peux pas dessiner le territoire avant d’en étudier le fonctionnement original. Autrement dit, la question de la frontière se déploie et se négocie à chaque instant de mon travail.
MIAOU! DEGAGE!
Walter, comme beaucoup d'entres nous sans doute, associe l'idée du territoire dans le monde animal à celle de la violence et de l'affrontement. Le professeur Wiki est d'un tout autre avis… Comment se manifestent les rapports territoriaux chez l'animal? Quand apparaissent-ils exactement? De quelle manière le comportement animal fait-il écho à celui de l'homme? Ecoutons-les plutôt…
MORT AUX ROUX!
Les renards à Bruxelles
PETITE INTRODUCTION A LA DIMENSION CACHEE
Comment utilise-t-on l’espace – plus précisément, l’espace qu’on maintient entre soi et les autres, et celui qu’on construit autour de soi, à la maison ou au bureau. C’est la question que pose l’anthropologue américain Edward T. Hall dans « La dimension cachée » (1966). Pour lui, la façon qu’a l’homme d’utiliser l’espace fait partie des dimensions inconscientes, « cachées », de notre expérience. Il soutient que l’espace est un produit culturel. Chaque civilisation a sa manière de concevoir les déplacements du corps, l’agencement des maisons, les conditions de la conversation, les frontières de l’intimité.
PREAMBULE
Un territoire est une partie d’espace caractérisée par deux éléments : des limites et un investissement spécifique par des êtres ou des choses. Le territoire n’est pas un milieu extérieur où se distribuent des populations et/ou des biens, ce n’est pas non plus une toile de fond où viendraient se jouer des événements. Le territoire est une intériorité déployée, un cercle intime marquant les frontières avec l’extérieur. Le territoire fonctionne dès lors souvent comme marqueur de repères.
REGARDS NEERLANDAIS SUR BRUXELLES
L’histoire a fait de Bruxelles, carrefour de cultures et de migrations, une ville cosmopolite. Un Bruxellois sur quatre (28,4 %) est une personne d’origine étrangère. Si l’on parle fréquemment des grandes communautés d’immigrés, qui y ont parfois créé de véritables nouveaux quartiers, on évoque assez peu les communautés qui ne font pas de vagues mais qui sont pourtant très présentes et actives à Bruxelles. Il y aurait un peu plus de 5000 ressortissants néerlandais dans la capitale. Dont un bon nombre d’artistes, comme le peintre Bram Bogart, qui se sent manifestement tellement chez lui à Bruxelles qu’il a demandé sa naturalisation. |
Permalink : |
https://bibliotheque.territoires-memoire.be/pmb/opac_css/index.php?lvl=notice_di |
[article]
Titre : |
Territoires ? : dossier |
Type de document : |
texte imprimé |
Année de publication : |
2007 |
Article en page(s) : |
pp. 9-20 |
Langues : |
Français (fre) |
Catégories : |
321.01 Pouvoirs.Frontières 71 Aménagement du territoire. Urbanisme. Architecture paysagère
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Résumé : |
DOSSIER : TERRITOIRES ?
"SANS FRONTIERES", LA FIN D'UN RÊVE?
Il y a 15 ans, on parlait de « fin de l’Histoire » et les diplomates n’avaient que le mot « multilatéral » à la bouche; les morceaux du rideau de fer tombaient les uns après les autres. En Europe l’espace Schengen entrait en vigueur en 1995 et augurait de belles perspectives de libre déplacement. Les «sans-frontières», sur la lancée de leurs aînés des années 70 et 80 (Médecins Sans Frontières, Reporters Sans Frontières…), florissaient sur fond de promesses de paix et de réduction des iniquités, l’appellation proliférant au point de contaminer tous les domaines de la société. Naissaient ainsi les associations « Meubles sans frontières », «Douleurs sans frontières » et même « Autistes sans frontières », tout un programme.
CARTOGRAPHIE DE L'INTIME
Que nous disent les configurations des espaces de vie des couples ? Comment ceux-ci appréhendent-ils le partage et l’appropriation d’une zone commune où il faut manger, cuisiner, dormir, lire, se détendre, travailler, faire sa toilette? Existe-t-il des règles et lesquelles ? L’aménagement est-il spontané ou, au contraire, construit et réfléchi ? Trois couples ont accepté de nous ouvrir les portes de leurs territoires. Etats des lieux.
CHASSEURS DE CHICANOS DU DIMANCHE : LES MINUTEMEN
Comment devenir un gros beauf en moins d’une minute ? Simple: suivre l’exemple des volontaires civils qui, depuis avril 2005, patrouillent avec leur camping-car le long de la frontière entre les Etats-Unis et le Mexique.
DANS LA RETINE DE L'ENFER - EXTRAITS
Nous, nous sommes assurés d’avoir fait disparaître nos traces en cours de chemin, sur les pierres couchées face à la lune, sur l’herbe des champs hostiles, dans les derniers rayons de lune qui nous ont éclairés, dans les dernières fines gouttes d’une pluie glacée, dans le souffle que nos poumons rejetaient essoufflés. Nous avons pris soin de marcher vers le vent comme vers nous-mêmes pour qu’il ne puisse dénoncer nos souffrances et nos peines. Nous avons évité que la lumière des dernières étoiles ne nous surprenne et dénude nos rêves.
DROIT DANS LES MURS!
De jour comme de nuit, le mur fait le monde et ses habitants font le mur. Exhibée comme une sinistre et révélatrice mise en garde à la face de l’univers infini, la seule construction humaine visible depuis l’espace durant les clairs de Terre est un mur : la muraille de Chine, un ouvrage millénaire et militaire de dizaines de milliers de kilomètres de (très, très) long.
ÊTRE D'ICI, NAÎTRE AILLEURS - RENCONTRES
«Je ne me sens étranger ni à Londres, ni à New-York, ni en Inde mais le fait que je suis né en Inde et que j’y suis resté très attaché est toujours là . C’est cette réalité qui sous-tend mon identité.(…) Aujourd’hui notre identité est faite de 50 éléments différents, ce qui fait qu’elle se recoupe bien plus qu’autrefois avec celle des autres. Un chauve hindou et un chauve musulman comme moi ont beaucoup en commun, surtout quand le soleil tape.» * Salman Rushdie
L'ESPACE PUBLIC, UN CLUB PRIVE?
L’espace public c’est la place en bas de chez vous. Si vous arrivez à vous l’approprier, à la vivre, elle peut devenir l’un de vos territoires, l’un des multiples lieux que vous avez investi d’un souvenir ou d’un vécu. Mais l’espace public, c’est aussi le lieu abstrait du débat, lieu d’expression des contre-pouvoirs, espace de transition entre les volontés citoyennes et l’autorité de l’Etat. Cette place, en bas de chez vous, est-elle réellement publique ? Tout le monde peut-il s’y asseoir nonchalamment? Tout le monde peut-il y manifester et y exprimer ses opinions ? L’espace qui s’étend sous vos yeux et vos porte-voix peut-il être approprié comme territoire par n’importe qui, ou est-il la chasse gardée de certains ?
L'EUROPE : FORTERESSE CONTRE DE NOUVELLES INVASIONS OU TERRITOIRE SANS NATION?
En marge d’une interview qu’il nous accordait pour le dossier précédent sur les transports, l’un des portes-paroles de l’UDEP (Union pour la défense des sans-papiers) nous signalait un fâcheux paradoxe: depuis l’entrée en vigueur de la liberté de circulation dans l’espace Schengen, la mobilité des clandestins souffre toujours plus de répression. L’Union Européenne ne cesse d’ailleurs pas de perfectionner son arsenal répressif dans la guerre qu’elle leur a déclarée. Comme si la liberté et les droits des uns (les citoyens européens de première catégorie) étaient liés par un fil bien étrange à l’interdiction et au refoulement des autres (les candidats à l’exil et à l’asile).
LE TEMPS D'UNE PASSE
Le quartier nord est souvent évoqué comme symbole des tensions urbaines à Bruxelles. L’avancée prioritaire des bureaux sur les habitations y est rythmée par les navetteurs qui, à peine sortis de l’imposante gare du Nord, continuent de circuler comme sur des rails. La transformation lente de ce quartier promis à un avenir économique aux horizons européens évolue au sein d’une population locale en majorité d’origine étrangère. Ce «nettoyage» planifié du quartier se fait apparemment sans heurts. Il est presque approuvé par les bruxellois du fait de l’image qu’ils ont de cette zone : un quartier dangereux, berceau de pulsions meurtrières de populations qu’on ne peut imaginer qu’en déroute. Ce quartier renferme pourtant des espaces socialement indispensables.
LES TERRITOIRES COMME ACTIVITES : NE PAS PENSER A VIDE
Disons que je suis ethnographe et que, comme tel, je fais du « terrain », ce qui consiste à fabriquer un champ relationnel et finalement un point de vue, le plus intéressant possible. Territoire et terrain ont une racine commune et la construction d’un terrain relationnel correspond justement à la saisie de « territoires ». Disons que les activités territoriales sont les manières qu’ont les entités vivantes ou physiques d’entretenir les unes avec les autres des postures, des gestes, des esthétiques spécifiques mais également des énoncés. C’est bien tout un ensemble relationnel en acte qui forme un « ici » et déploie quelque chose de l’ordre d’une frontière. Comme ethnographe, je ne peux donc pas présupposer la forme et le chemin exacts de cette frontière avant d’étudier un territoire : je ne peux pas dessiner le territoire avant d’en étudier le fonctionnement original. Autrement dit, la question de la frontière se déploie et se négocie à chaque instant de mon travail.
MIAOU! DEGAGE!
Walter, comme beaucoup d'entres nous sans doute, associe l'idée du territoire dans le monde animal à celle de la violence et de l'affrontement. Le professeur Wiki est d'un tout autre avis… Comment se manifestent les rapports territoriaux chez l'animal? Quand apparaissent-ils exactement? De quelle manière le comportement animal fait-il écho à celui de l'homme? Ecoutons-les plutôt…
MORT AUX ROUX!
Les renards à Bruxelles
PETITE INTRODUCTION A LA DIMENSION CACHEE
Comment utilise-t-on l’espace – plus précisément, l’espace qu’on maintient entre soi et les autres, et celui qu’on construit autour de soi, à la maison ou au bureau. C’est la question que pose l’anthropologue américain Edward T. Hall dans « La dimension cachée » (1966). Pour lui, la façon qu’a l’homme d’utiliser l’espace fait partie des dimensions inconscientes, « cachées », de notre expérience. Il soutient que l’espace est un produit culturel. Chaque civilisation a sa manière de concevoir les déplacements du corps, l’agencement des maisons, les conditions de la conversation, les frontières de l’intimité.
PREAMBULE
Un territoire est une partie d’espace caractérisée par deux éléments : des limites et un investissement spécifique par des êtres ou des choses. Le territoire n’est pas un milieu extérieur où se distribuent des populations et/ou des biens, ce n’est pas non plus une toile de fond où viendraient se jouer des événements. Le territoire est une intériorité déployée, un cercle intime marquant les frontières avec l’extérieur. Le territoire fonctionne dès lors souvent comme marqueur de repères.
REGARDS NEERLANDAIS SUR BRUXELLES
L’histoire a fait de Bruxelles, carrefour de cultures et de migrations, une ville cosmopolite. Un Bruxellois sur quatre (28,4 %) est une personne d’origine étrangère. Si l’on parle fréquemment des grandes communautés d’immigrés, qui y ont parfois créé de véritables nouveaux quartiers, on évoque assez peu les communautés qui ne font pas de vagues mais qui sont pourtant très présentes et actives à Bruxelles. Il y aurait un peu plus de 5000 ressortissants néerlandais dans la capitale. Dont un bon nombre d’artistes, comme le peintre Bram Bogart, qui se sent manifestement tellement chez lui à Bruxelles qu’il a demandé sa naturalisation. |
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in C4 > 155-156 (mai-juin 2007) . - pp. 9-20
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